41. Centrales thermiques

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1. Présentation du domaine d'intervention
2. Effets sur l'environnement et mesures de protection

2.1 L'air

2.1.1 Dépoussiérage
2.1.2 Désulfuration
2.1.3 Dénitrification
2.1.4 Effet de serre
2.1.5 Emissions diffuses

2.2 L'eau
2.3 Les sols et les eaux souterraines
2.4 L'homme
2.5 Le Paysage

3. Aspects à inclure dans l'analyse et l'évaluation des effets sur l'environnement

3.1 Valeurs limites des retombées de polluants atmosphériques
3.2 Valeurs limites des émissions de polluants atmosphériques
3.3 Mesures
3.4 Valeurs limites d'émission pour les eaux usées
3.5 Bruit

4. Interactions avec d'autres domaines d'intervention
5. Appréciation récapitulative de l'impact sur l'environnement
6. Bibliographie
7. Annexe

Annexe A-1
Annexe A-3
Annexe A-4
Annexe A-5 Lois et prescriptions allemandes sur la limitation
Annexe A-6
Annexe A-7 Exigences minimales selon art. 7a de la loi sur la gestion de l'eau WHG Annexe 47: lavage des fumées d'installations de combustion, 08-09-1989

1. Présentation du domaine d'intervention

Par centrales thermiques, on désigne les installations servant à transformer des énergies primaires soit uniquement en énergie électrique, soit à la fois en électricité et en chaleur utile. Selon la source d'énergie primaire utilisée et la forme d'énergie produite, on distingue plusieurs types de centrales thermiques.

Les sources d'énergie susceptibles d'être utilisées par une centrale thermique sont:

- les combustibles fossiles tels le charbon, les produits pétroliers et le gaz naturel
- des résidus et déchets, notamment les ordures ménagères et les déchets d'origine industrielle, les huiles résiduelles.
- les combustibles fissiles ou nucléaires.

Les centrales thermiques peuvent être conçues pour différentes combinaisons de combustibles afin d'obtenir une plus grande flexibilité au niveau de l'approvisionnement ou des rendements plus élevés. Ainsi, il existe des centrales combinées à groupe gaz-vapeur, comprenant une turbine fonctionnant au gaz naturel et un groupe évaporatoire chauffé au pétrole ou au charbon alimentant la turbine à vapeur.

Nous ne traiterons pas ici les énergies renouvelables, tel bois et autres formes de biomasse, qui font l'objet d'un dossier de l'environnement spécifique. Nous ferons également abstraction des centrales thermiques nucléaires pour nous consacrer exclusivement aux groupes de production utilisant des combustibles fossiles, particulièrement le charbon et les produits pétroliers. Ces matériaux constituent actuellement des sources d'énergie privilégiées dans la plupart des pays en développement et continueront de le faire dans un proche avenir. Quant aux usines hydroélectriques, elles sont traitées dans le dossier "Hydraulique lourde".

En fonction des formes d'énergie produite, on pourra classer les centrales thermiques selon les catégories suivantes:

- centrales à condensation ne produisant que de l'électricité.
- centrales de chauffage ne fournissant que de la chaleur sous forme de vapeur ou d'eau chaude, desservant un réseau public ou assurant l'approvisionnement de processus industriels.
- centrales à production mixte, fournissant à la fois du courant électrique et des calories utiles.

Il convient de noter ici que la production de chaleur aux fins de chauffage ou d'approvisionnement de processus de fabrication ne peut se justifier économiquement que si la centrale est implantée à proximité des lieux de consommation, c.-à-d. que l'éloignement entre celle-ci et les points desservis ne doit pas dépasser 2 à 5 km pour une puissance thermique de l'ordre de 50 à 100 MW. Quant au transport d'électricité, il est rentable sur de bien plus grandes distances (cf. Dossier de l'environnement "Transport et distribution d'électricité").

Les centrales thermiques utilisant des combustibles fossiles peuvent présenter des puissances unitaires allant de quelques centaines de kilowatts (centrales à moteurs diesel) à plus de 1 000 mégawatts (centrales au pétrole ou au charbon). Dans de nombreux pays, celles-ci sont souvent limitées à 200, 300 MWel, par suite de problèmes de stabilité du réseau et de disponibilité des équipements. Là où les conditions sont plus favorables, des capacités plus importantes sont possibles.

2. Effets sur l'environnement et mesures de protection

Les effets d'une installation sur l'environnement sont à la fois fonction de l'installation elle-même et de son site d'implantation. En ce qui concerne les centrales thermiques, ces effets ont leur origine dans différents éléments de l'installation. Voici ci-après les équipements essentiels dont peut être composée une centrale thermique:
- équipements de conditionnement et de stockage des combustibles
- installations de combustion et de production de vapeur
- équipements de production d'énergie électrique et de chaleur
- équipements de traitement des fumées, des résidus solides et liquides
- équipements de réfrigération.

A l'annexe A.-1, on trouvera une récapitulation des centrales thermiques avec indication des différents combustibles, résidus et flux de matière ayant des implications écologiques.

Les différents types d'émissions, susceptibles d'être générés au cours des différents processus, sont présentés dans le tableau 1 ci-après:

Tableau 1
Différents types d'émissions pouvant être générés par une centrale thermique
Processus

Type d’émission Stockage et traitement du combustible Combustion et production de vapeur Epuration des fumées Production d'électricité Installations de réfrigération Traitement des résidus
Poussières * *     * *
Gaz nocifs   *       *
Eaux usées * * *   * *
Résidus solides   * *     *
Chaleurs perdues   *   * *  
Bruit * * * * * *
Pollution de la nappe phréatique *          

Il ressort de ce tableau que les centrales thermiques peuvent être à l'origine d'émissions pouvant avoir des effets nuisibles sur l'air ambiant, l'eau et les sols, de même que sur les êtres vivants, les plantes et les paysages.

Le problème de la mise en décharge des résidus, tel qu'il se pose dans le cas des centrales à pétrole et à charbon, sera abordé au point 2.3.

Dans une centrale thermique, les plus importantes répercussions sur l'environnement sont celles imputables aux équipements de combustion et aux poussières et gaz nocifs qu'ils dégagent. D'une façon générale, on peut affirmer que l'ampleur de l'impact sur l'environnement, en termes d'émissions de polluants, d'encombrement au sol de la centrale ainsi que de quantités de résidus va en croissant dans l'ordre: gaz, mazout, pétrole et charbon.

Avant de nous avancer plus loin dans la description des effets sur l'environnement imputables aux différents processus et équipements et des mesures de protection envisageables, il nous faut apporter une précision sur la structure du présent document: Le corps principal est consacré aux aspects essentiels des effets et des mesures de protection alors que les indications figurant en annexe fournissent des détails sur les moyens techniques de lutte contre la pollution.

Dans le cadre de l'étude des effets sur l'environnement de l'exploitation d'une centrale thermique, il convient de faire la distinction entre émissions, c.-à-d. les polluants générés par les différentes unités de la centrale et rejetés en grande partie par la cheminée, et immissions, à savoir le transfert des polluants vers un milieu récepteur, essentiellement au niveau du sol. Souvent, on préférera au terme "immission" d'origine allemande, les mots "retombées" ou "nuisances", qui peuvent sembler plus parlant. Comme on l'imagine, "émissions" et "immissions" sont étroitement liées par le jeu de différents facteurs, notamment les aspects techniques (hauteur, vitesse et température des rejets), atmosphériques (conditions météorologiques, vitesse du vent) et le facteur distance (éloignement entre la source émettrice et le point de mesure des retombées). En ce qui concerne les nouveaux projets de centrale, on peut encore influer sur les paramètres de la première et deuxième catégorie, notamment la hauteur de la cheminée et la distance par rapport aux habitations les plus proches, alors que dans le cas de centrales déjà existantes, on ne pourra modifier que les grandeurs de la première catégorie. Comme le veut la loi de la conservation de la masse, tous les polluants émis (à l'exception du CO2) finissent nécessairement par se retrouver au sol. Certes, dans le cas de cheminées très élevées, de grandes vitesses de rejet et de vents rapides, ils seront dispersés sur une aire beaucoup plus vaste que dans le cas contraire. Le rehaussement de la cheminée en particulier est un moyen relativement simple qui permet d'obtenir une réduction de la concentration des polluants sur une superficie donnée. Mais les émissions étant alors réparties sur une zone géographique plus étendue, il importe d'examiner si une telle mesure ne risque pas d'augmenter de manière intolérable le niveau de pollution au-delà de la superficie considérée.

Les mesures visant à réduire les effets d'une centrale thermique sur l'environnement peuvent se répartir selon les catégories suivantes:

- Modifications des conditions d'ensemble

- Mesures de protection autres que les moyens techniques

- Mesures de protection faisant appel à des moyens techniques

· Réduction des immissions, par le biais d'un surélévation de la cheminée de la centrale par exemple.
· Mesures visant à réduire les rejets:

* Mesures primaires destinées à empêcher ou à réduire les émissions de polluants, telles que la sélection d'un combustible peu polluant (gaz naturel plutôt que charbon, par ex.), l'homogénéisation du combustible pour éviter les pics de pollution, augmentation du rendement, mesures relatives au foyer afin de limiter les émissions de NOx
* Mesures secondaires, c.-à-d. traitement des gaz de fumées afin d'en extraire les polluants avant leur rejet dans l'atmosphère.

Pour ce qui est de la préséance des mesures, la priorité doit revenir aux dispositions visant à réduire ou mieux à éviter la pollution, le traitement ou le conditionnement des effluents et résidus ne devant intervenir qu'en second lieu. Autrement dit, on devra d'abord chercher à éviter l'apparition des polluants ou à réduire celle-ci, avant de mettre en oeuvre des techniques de traitement secondaires.

Ici, un aspect important est l'accroissement du rendement, par exemple par la mise en place de centrales mixtes à groupes gaz-vapeur ou de centrales de production combinée d'électricité et de chaleur, qui permettent de réduire les émissions de polluants par rapport aux quantités d'énergie produites.

L'amélioration du rendement est également un moyen probant pour réduire les rejets de CO2, polluant figurant parmi les responsables de l'effet de serre. Pour d'autres possibilités de réduction des émissions de CO2, par le recours aux énergies renouvelables pour la production d'électricité par exemple, le lecteur est prié de se reporter au dossier "Energies renouvelables".

En ce qui concerne les effets sur l'environnement, on devra faire la distinction entre les effets directs, sous forme d'émissions de substances polluantes, etc., et les effets indirects tels que le transfert de polluants de l'atmosphère dans les cours d'eau. Ce transfert a lieu, par exemple, lorsque les effluents de laveurs ne sont pas soumis à un traitement adéquat avant leur déversement dans le milieu récepteur ou encore lorsque le calcaire injecté dans les foyers doit être extrait dans une carrière et que son abattage et son transport par camion du lieu d'extraction à la centrale constituent une source de pollution. Par ailleurs, d'autres répercussions peuvent surgir lorsqu'il s'agit, par exemple, d'éliminer le plâtre issu des installations de désulfuration des fumées.

Ci-après nous allons passer en revue les différents éléments subissant les effets de la pollution et les mesures de protection envisageables.

2.1 L'air

Sur le site d'une centrale thermique, l'air est surtout pollué directement par les émissions de poussières et de gaz nocifs.

Dans une seconde phase, les poussières et la plupart des gaz nocifs rejetés dans l'atmosphère, ou encore les produits de transformations chimiques auxquels ils ont donné naissance dans l'atmosphère (par ex. NO2 et nitrate provenant du monoxyde d'azote), retombent au sol avec les précipitations atmosphériques (pluie, neige) ou sous forme de particules sèches. Cela engendre une charge polluante pour les eaux et le sol pouvant nuire à la flore et à la faune.

Selon le combustible utilisé (type, composition, pouvoir calorifique) et le mode de combustion (foyer à cendres sèches ou foyer à cendres fondues), les gaz de combustion émis contiennent différentes quantités de polluants (poussières, métaux lourds, SOx, NOx, CO, CO2, HCl, HF, composés organiques). Les taux d'émission possibles en fonction des combustibles, et utilisés en l'absence de dispositifs d'épuration des fumées, sont présentés au tableau 2 ci-après.

Tableau 2
Concentrations possibles de polluants dans les gaz non épurés

Type d'émission Gaz naturel Mazout Pétrole Houille Lignite
Oxydes de soufre (SOx) - mg/m3 (c.n.) 20 - 50 300-2000 1000-10000 500-800 500-18000
Oxydes d'azote(NOx) - mg/m3 (c.n.) 100-1000 200-1000 400 - 1200 600-2000 300 - 800
Poussières- mg/m3 (c.n.) 0 - 30 30 - 100 50 - 1000 3000-40000 3000-50000

Les taux d'émission du tableau 2 sont fournis en mg/m3 de gaz comme le prescrivent les règlements en vigueur en Allemagne (Instructions Techniques sur le maintien de la pureté de l'air "TA-Luft", prescriptions relatives aux chaudières industrielles). Les valeurs SOx et NOx sont calculées sous la forme SO2 et NO2. Pour certains polluants, les valeurs limites sont énoncées sous forme de débit (kg/h par ex.) ; pour d'autres, un certain degré d'efficacité des dispositifs de filtration est prescrit (cf. annexe A.-6). Pour faciliter au lecteur la conversion des concentrations indiquées en d'autres unités (ppm, g/GJ ou l'unité lb de polluant/106 de BTU énergétique couramment employée aux Etats-Unis), nous avons fait figurer un tableau de conversion à l'annexe A-6.

Les marges du tableau 2 en ce qui concerne les oxydes de soufre s'expliquent par la teneur en soufre qui varie selon les combustibles utilisés, d'autant plus que dans de nombreux pays les combustibles locaux utilisés, tel le lignite par exemple, ont un faible pouvoir calorifique mais une teneur en soufre élevée. La conjonction "haute teneur en polluants" et "faible pouvoir calorifique" se traduit par des concentrations notables de SOx dans les gaz non épurés.

Pour ce qui est des concentrations en NOx, la teneur en azote des gaz de fumées n'est pas tant le fait de l'azote contenu dans le combustible (NOx du combustible) mais provient essentiellement de l'oxydation de l'azote de l'air par l'oxygène à des températures de combustion de plus de 1200° C (NOx thermique). Ainsi de hautes températures de combustion ont pour corollaire des émissions de NOx élevées. Les mesures primaires de réduction au niveau des équipements de combustion, qui, surtout dans le cas de nouvelles installations, peuvent être mises en oeuvre moyennant des coûts d'investissement relativement faibles, permettent de ramener les émissions aux valeurs inférieures énoncées dans le tableau. Néanmoins, il faudra toujours assurer une bonne combustion afin d'éviter qu'un excès de mesures primaires visant à réduire le taux de NOx se traduise par une augmentation hors de proportions des autres émissions, notamment le monoxyde de carbone et les hydrocarbures imbrûlés.

La limitation des rejets de CO s'obtient en premier lieu par le contrôle du degré de combustion qui permet en même temps de réduire les émissions d'hydrocarbures imbrûlés. Contrairement aux émissions de poussières, de SO2, de NOx et de composés halogénés, le monoxyde de carbone et les hydrocarbures imbrûlés ne peuvent pratiquement pas être retenus par les dispositifs d'épuration. Or, parmi les hydrocarbures imbrûlés, on note de nombreuses substances chimiques, dont certaines posent de sérieux problèmes de toxicité, tels les benzopyrènes.

Les unités brûlant du charbon ou du pétrole émettent également de faibles quantités d'acide chlorhydrique (HCl) et d'acide fluorhydrique (HF), de l'ordre de 50 à 300 mg/m3. Les concentrations de ces polluants dans les gaz de combustion, qui sont généralement nettement inférieures à celles de SO2, vont également se trouver réduites par les installations de désulfuration et cela encore plus que celle de l'anhydride sulfureux.

Pour la réduction des émissions de polluants dans les fumées des centrales thermiques, on dispose de toute une panoplie de mesures primaires et secondaires. Le schéma de l'annexe A-2 illustre à titre d'exemple l'intégration de mesures secondaires de dénitrification, de dépoussiérage et de désulfuration sur le parcours des gaz de fumée d'un générateur de vapeur. Ci-après, nous allons brièvement examiner les différentes mesures de réduction des émissions.

2.1.1 Dépoussiérage

Pour le dépoussiérage dans les centrales électriques, on a recours à des cyclones, multicyclones, électrofiltres et filtres à tissu. Ces dispositifs sont énumérés dans l'ordre croissant de leur efficacité qui est de l'ordre de 60 à 70% pour les cyclones et atteint plus de 99% pour les électrofiltres, encore appelés dépoussiéreurs électrostatiques, et les filtres à tissu. Il est vrai que les frais d'investissement augmentent avec le rendement et cela dans des proportions bien supérieures. Dans le cas des électrofiltres, le rendement de dépoussiérage augmente avec le nombre de champs ou éléments adjacents mis en oeuvre. Grâce à ces dispositifs où à des filtres à tissu, il est possible de ramener les taux de polluants résiduels dans les fumées à respectivement 50 et 30 mg/m3 (état normal). Les cyclones présentent l'inconvénient de ne retenir essentiellement que les poussières les plus grossières alors que les fractions plus fines, qui pénètrent plus facilement dans les voies respiratoires et sont donc plus dangereuses sur le plan toxicologique, ne sont pas éliminées. Les filtres à tissu sont particulièrement intéressants pour l'élimination de poussières fines, dans lesquelles s'accumulent les métaux lourds. Les coûts d'investissement pour le dépoussiérage des gaz de fumée dépendent de différents paramètres, tels que le type de combustible et le rendement de dépoussiérage nécessaire ainsi que la technique mise en oeuvre et se situent entre 20 et 70 DM/kWel. Les coûts d'exploitation sont de l'ordre de 0,1 à 0,6 DM/MWh. Les combustibles à fortes teneurs en cendres utilisés dans certains pays posent de sérieux problèmes de dépoussiérage. Les difficultés liées à l'évacuation des grandes quantités de cendres volantes, qui doivent alors être soit récupérées par l'industrie des matériaux de construction, soit mises en décharge viennent encore s'y ajouter. Selon les propriétés de ces cendres volantes, on devra recourir à des additifs pour inertiser le produit résiduaire à stocker et ainsi éviter les phénomènes de lessivage susceptibles de conduire à une contamination des eaux souterraines.

2.1.2 Désulfuration

Pour la réduction des émissions de SOx provenant des appareils de combustion, on peut faire appel à des mesures primaires (utilisation de combustibles à faible teneur en soufre, désulfuration directe dans le foyer, méthode additive d'injection par voie sèche) ou des mesures secondaires, c.-à-d. l'élimination du SOx contenu dans les fumées.

Souvent on renonce à l'emploi de combustibles pauvres en soufre pour des raisons économiques. En fait, il faudrait examiner quel concept occasionne les frais globaux les plus faibles dans chaque cas particulier. Ainsi, par exemple, l'utilisation d'un combustible plus pauvre en soufre peut engendrer des coûts d'exploitation plus élevés, mais se traduire pour la centrale thermique en question par un bilan plus favorable du fait des économies réalisées grâce aux frais d'investissement et d'exploitation des équipements de désulfuration qu'on a pu ainsi éviter. L'analyse à effectuer devrait bien entendu également englober d'autres aspects, tels que l'utilisation des combustibles locaux en vue d'obtenir une bonne sécurité d'approvisionnement, par exemple.

En ce qui concerne les produits pétroliers contenant du soufre, on distingue, tout comme pour les combustibles solides, des mesures primaires et secondaires de réduction de la pollution. Les mesures primaires consistent d'une manière générale à faire subir au produit, le pétrole obtenu par distillation atmosphérique ou sous vide, une hydrogénation visant à éliminer le soufre. Ces méthodes ne sont rentables que dans le cas d'importantes capacités et ne peuvent donc être pratiquées que dans les raffineries de pétrole. Dans les centrales thermiques, on pourra, pour réduire les émissions de SOx, employer un produit pétrolier pauvre en soufre ou un mélange de différents combustibles ou faire appel à la désulfuration des fumées fonctionnant d'après le même principe que le dispositif de désulfuration pour combustibles solides décrit ci-après et à l'annexe A-3.

Pour ce qui est du charbon, en particulier lorsque sa composition est soumise à d'importantes fluctuations comme c'est le cas de certains charbons provenant de gisements locaux dans de nombreux pays, on pourra obtenir un effet positif en réalisant des mélanges appropriés tendant à homogénéiser le combustible en ce sens qu'on évitera les chargements où le taux de soufre est extrêmement élevé. Ainsi on n'aura pas à tenir compte des valeurs de pointe correspondantes pour la conception des systèmes de désulfuration. On voit ici à quel point il est important de soumettre le combustible à une analyse approfondie en ce qui concerne le pouvoir calorifique, la teneur en eau et en cendres ainsi que la teneur en soufre et d'étendre cette analyse, par exemple, au différentes veines d'un gisement de charbon. Il est également important de savoir à quel point on devra tenir compte d'une autodésulfuration du charbon due à la présence de composés calciques.

Une désulfuration du charbon pourra avoir lieu dans le cadre des opérations de traitement sur le carreau de la mine ou sur le chantier d'exploitation à ciel ouvert, opérations au cours desquelles non seulement le soufre mais des substances inertes sont éliminées du charbon, essentiellement par voie humide. Selon le type de charbon et le type de liaison du soufre, ce dernier pourra être réduit de 5 à 80%, surtout dans le cas de la houille. Le soufre à liaison organique quant à lui ne peut pas être réduit par les méthodes de traitement des matériaux. Le soufre sulfidique, à l'état de pyrite (FeS2) dans la plupart des cas, peut être séparé s'il se présente à l'état libre dans le charbon brut ou, dans le cas d'associations minérales, si sa granulométrie est telle, qu'il peut être dissocié par broyage.

Une désulfuration directe au niveau du système de combustion de combustibles solides s'obtient au moyen de foyers à lit fluidisé, les rendements de désulfuration étant alors de l'ordre de 80 à 90%. Les méthodes d'injection par voie sèche utilisées pour le charbon permettent d'obtenir une désulfuration de 60 à 80% (cf. annexe A-3).

Avec des installations de désulfuration des gaz de fumée, on pourra obtenir des rendements de désulfuration de 90 à 95%. Les installations de désulfuration des fumées entraînant des frais d'investissement et d'exploitation relativement élevés, il peut dans certain cas s'avérer judicieux de ne faire subir une désulfuration qu'à un flux partiel des gaz de combustion, les gaz non désulfurés étant alors utilisés pour réchauffer les gaz épurés.

Parmi toutes les techniques décrites ci-dessus, les installations de désulfuration des fumées sont celles qui nécessitent les moyens les plus importants, tant en ce qui concerne les frais occasionnés que par le volume des équipements à installer. Dans chaque cas particulier, il conviendra d'examiner si les installations en question peuvent être intégrées après coup dans une centrale existante.

Si l'on compare les différentes mesures primaires et secondaires énumérées, on constate que les mesures primaires ont les rendements de désulfuration les plus faibles, mais entraînent moins de coûts et peuvent, dans la plupart des cas, être mises en oeuvre dans des centrales existantes. Cela n'est toutefois pas le cas pour les lits fluidisés qui ne peuvent être intégrés que dans de nouvelles installations (capacité maximale des installations de type industriel jusqu'à présent 150 MWel).

Tout comme pour le dépoussiérage, toutes les méthodes de désulfuration soulèvent le problème de l'utilisation ou de l'évacuation des résidus ou, parfois, des effluents aqueux générés par les installations (cf. point 2.3).

Selon la taille des équipements, la technique retenue, le rendement, etc., les frais d'investissement pour la désulfuration peuvent varier entre 30 et 550 DM/kWel. Les procédés d'injection par voie sèche sont les moins coûteux alors que les méthodes régénératives, fournissant des composés sulfurés comme sous-produits nécessitent les investissements les plus élevés.

Les différents procédés de désulfuration s'accompagnent également d'un élimination de composés halogénés (HCl, HF, etc.) selon un rendement d'épuration encore supérieur que pour le soufre.

2.1.3 Dénitrification

Pour la dénitrification, on peut faire appel à des mesures primaires ou secondaires. Tout comme pour la désulfuration, le choix du combustible exerce une influence sur les émissions de NOx. Néanmoins, comme nous l'avons vu au point 2.1, la formation des NOx repose sur un phénomène plus complexe que la conversion du soufre contenu dans le combustible en SO2. Au moyen de mesures primaires, on parvient à réduire le taux de formation de NOx lors de la combustion. Ici, l'objectif essentiel est la réduction de la température maximale des flammes. Pour cela, on peut faire appel à des mesures relatives aux équipements de combustion: conception de la chambre de combustion, disposition des brûleurs, construction des brûleurs, admission de l'air comburant, réduction de l'excès d'air, ou encore des mesures relatives au régime de fonctionnement: diminution du réchauffage d'air ou utilisation de combustibles à faible teneur en azote, etc.

Les mesures secondaires portent sur le traitement des fumées afin de réduire leur teneur en NOx. Pour cela, différentes méthodes ont été mises au point qui ont pour effet soit d'éliminer uniquement les NOx, soit à la fois les oxydes de soufre et d'azote.

La seule méthode ayant jusqu'à présent trouvé son emploi à l'échelle industrielle est la réduction sélective catalytique des NOx (méthode SCR). Pour la réduction, on utilise de l'ammoniac qui en présence du catalyseur, réagit avec l'oxyde d'azote en fournissant de l'eau et de l'azote. Contrairement au dépoussiérage et à la désulfuration, cette méthode ne fournit donc pas de résidus qui doivent ensuite être éliminés. La méthode SCR fonctionne à une température de 300 à 400° C et peut, selon la configuration générale de l'installation être insérée, côté gaz brut, par exemple en amont du réchauffeur d'air (SCR devant le réchauffeur) ou, côté gaz épurés, en aval d'une installation de désulfuration (SCR après désulfuration).

La méthode SCR permet d'obtenir des rendements de dénitrification de 80 à 90%.

Un autre concept, particulièrement bien adapté pour les faibles taux de dénitrification jusqu'à environ 60%, est celui de la méthode SNCR (réduction sélective non catalytique). Ici, la réduction du taux de NOx est obtenu par l'injection d'ammoniac dans l'installation de combustion à une température d'environ 1 000° C.

Selon l'importance de l'installation, le rendement, la disposition, etc., les frais d'investissement pour la dénitrification des fumées se situent entre 120 et 250 DM/kWel.

2.1.4 Effet de serre

Les principaux responsables de l'effet de serre, c'est-à-dire du réchauffement à long terme de la planète sous l'effet de gaz rejetés dans l'atmosphère, sont le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), les chlorofluorocarbures (CFC), l'ozone troposphérique (O3) et l'oxyde de diazote (N2O). L'ordre dans lequel ces gaz sont énoncés correspond également à leur importance respective. La contribution de chacun de ces gaz à l'effet de serre est spécifique et demande une analyse très différenciée. Ainsi par exemple le méthane a un effet 21 fois plus élevé que le gaz carbonique mais apparaît dans des quantités bien moindres que le CO2 qui constitue le produit de toute combustion carbonée.

Les mesures visant à limiter les émissions de CO2 consistent avant tout à utiliser des centrales thermiques à haut rendement, comme par exemple celles à cycles mixtes gaz-vapeur ou les centrales produisant à la fois de l'électricité et de la chaleur.

D'autres mesures telles le recours aux énergies renouvelables, notamment les usines hydroélectriques, ainsi que les opérations visant à réguler les besoins en énergie électrique revêtent également une grande importance. Néanmoins leurs effets ne seront pas suffisants pour que l'on puisse renoncer à la production d'électricité au moyen de centrales thermiques utilisant des combustibles fossiles.

2.1.5 Emissions diffuses

A côté des émissions imputables aux phénomènes de combustion que nous venons d'énumérer et qui se présentent avant tout sous forme de rejets par la cheminée, une centrale thermique possède un certain nombre d'autres installations susceptibles d'émettre des polluants (cf. tableau 1). Ainsi, par exemple, les opérations de stockage, de transport et de traitement du combustible peuvent être à l'origine de dégagements de poussières. Pour réduire ceux-ci, on pourra recourir à des mesures appropriées, telle l'aspersion avec de l'eau ou le capotage du matériel aux emplacements critiques. En ce qui concerne le stockage et le transport des produits pétroliers, on dotera les réservoirs et groupes de pompage des dispositifs requis afin de réduire les pertes par évaporation ou de réintroduire dans le circuit les substances évaporées. De telles mesures revêtent surtout une grande importance dans les pays où règnent des températures plus élevées qu'en Europe centrale.


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