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Catalogue de questions à examiner dans le cadre de la planification écologique
Quelles sont les propriétés et caractéristiques naturelles du territoire à aménager ?
· Décrivez les éléments du paysage à l'aide de documents géologiques, hydrologiques, pédologiques, phytosociologiques, faunistiques et climatiques.
- Quels sont les types d'écosystème existants ?
- Parmi les éléments du paysage susmentionnés, quels sont ceux qui présentent une importance particulière pour les écosystèmes ?
Rétroaction : la délimitation géographique du territoire en question tient-elle suffisamment compte des interdépendances et interactions écosystémiques et fonctionnelles ?
· Si tel n'est pas le cas : (Propositions pour) l'intégration des espaces identifiés comme importants
Saisie et appréciation des caractéristiques d'aptitude et de sensibilité des biens naturels en tant que base pour l'évaluation de leur capacité de production (vocation) et de leur sensibilité à l'égard d'atteintes spécifiques (cf. Tab. 1) .
· Identification et délimitation spatiale de zones à forte capacité de production (p. ex. sols agricoles à "fort potentiel de régénération" ; zones riches en eaux souterraines) ;
· Identification et délimitation spatiale de zones particulièrement sensibles aux interventions dans le milieu naturel (notamment introduction de polluants, imperméabilisation de surfaces, érosion, morcellement des paysages, abaissement de la nappe phréatique) : zones d'inondation, zones d'affleurement de la nappe phréatique (marécages), systèmes de cours d'eau, sols sensibles à l'érosion, existence d'écosystèmes rares et menacés (végétation et faune) ;
· Identification et délimitation spatiale d'utilisations sensibles (p. ex. habitation, production d'eau potable, catégories de zones protégées nationales et régionales).
Nature et ampleur des pollutions et nuisances antérieures découlant des mode d'utilisation déjà pratiqués, charges pesant sur le milieu naturel
· Identification
et délimitation spatiale des zones déjà soumises à de fortes
pressions et des zones jusqu'ici relativement épargnées
· Identification
des pollutions et nuisances déjà existantes et liées à la
structure du territoire en question (p. ex.
urbanisation/infrastructure)
Quelles sont les utilisations/droits d'usage présents ou futurs définis par le plan général d'aménagement du territoire ou par les plans sectoriels intéressant l'aménagement du territoire ?
· Catalogue
des activités susceptibles d'avoir une incidence sur
l'environnement
· Liste
des objectifs et mesures des plans techniques sectoriels
· Quelles
activités utilisent quels biens naturels ?
· Où
y a-t-il des activités qui utilisent / portent atteinte à des
biens naturels servant à leur tour de base à d'autres
activités / utilisations ?
· Délimitation
spatiale de droits d'usage individuels et multiples ;
· Constat
de concentrations d'activités et de conflits d'utilisation
· Quelles
sont les causes des conflits d'utilisation (voisinage ou
concentration géographique d'activités incompatibles,
chevauchements). Y a-t-il une menace directe pour la santé
humaine (p. ex. contamination par des polluants, manque
d'hygiène) ?
Quels effets ces droits d'utilisation ont-ils sur l'environnement et quelles répercussions ont-ils sur les biens à protéger ?
· Etablissement
des relations de cause à effet
· Identification
des facteurs exerçant une influence sur les biens à protéger
concernés (milieu naturel, homme, aspects culturels)
· Identification
des pollutions/nuisances et de leur intensité à l'aide
d'indicateurs
Comment peut-on délimiter géographiquement ces effets ?
· Détermination
de la portée locale, régionale et nationale des effets ainsi
que de leurs interactions spatiales et fonctionnelles
· Où
des activités ou des utilisations fortement altéragènes se
superposent-elles ?
· Rétroaction
: La délimitation géographique du territoire visé par le plan
est-elle adéquate ?
Quelle importance les pollutions et nuisances prévisibles à court et long terme ont-elles pour les possibilités de développement à l'échelon national et régional ?
· Où
est-ce que l'exploitation durable des biens naturels est menacée
?
· Quelles
restrictions affectent l'utilisation des biens naturels ?
· Quelles
pollutions et nuisances apparaissent encore acceptables compte
tenu des nécessités de développement ?
· Quelles
sont les coûts économiques à attendre des dommages infligés
à l'environnement ?
Quelles sont les questions et unités géographiques prioritaires à prendre en compte dans une stratégie d'aménagement écologique ?
· Quels
sont les aspects particuliers d'une démarche écologiquement
prudente et socialement acceptable dont il convient de tenir
compte ?
· Quels
sont les objectifs prioritaires en termes de temps et d'espace ?
· Comment
peut-on hiérarchiser les objectifs (critères) ?
Quelles sont les possibilités et limites du développement de l'utilisation des ressources (dans la région) compte tenu des objectifs de la stratégie d'aménagement écologique ?
· Quelles
sont les alternatives envisageables par rapport au développement
actuel de l'utilisation des ressources sur l'ensemble du
territoire ?
· Quelles
autres alternatives y a-t-il par rapport aux différents plans
techniques et sectoriels ?
Pour quelles régions et quels domaines faut-il élaborer des propositions de protection, de développement et d'assainissement ?
· Quelles
sont les mesures de protection, de développement et
d'assainissement à proposer ?
· Où
est-il nécessaire d'éviter des conflits et des risques et
quelles sont les possibilités envisageables en plus des mesures
susmentionnées ?
L'inventaire des incidences sur l'environnement et la mise en évidence des interactions entre les différents facteurs en présence (modèles de causalité) est un élément essentiel de la prévision des risques susceptibles d'affecter l'environnement. La notion d'incidence sur l'environnement désigne les changements affectant les propriétés du milieu naturel, pouvant entraîner une réduction de sa capacité de production ainsi que des possibilités d'exploitation durable des ressources naturelles. C'est ce que l'on nomme également impact (ou effet) sur l'environnement.
L'éventail des incidences environnementales à étudier englobe non seulement les effets qui affectent directement le site concerné, mais encore ceux qui touchent les zones voisines (en ce qui concerne leur portée voir Gassner/Winkelbrandt 1990) ainsi que les effets secondaires et cumulés qui peuvent en découler. De plus, il faut tenir compte des effets qui peuvent s'exercer à de longues distances (p. ex. par transfert de polluants atmosphériques) et des répercussions à long terme (accumulation de polluants). En tenant compte des rayons d'action superposés de divers facteurs d'influence et en différenciant leurs incidences en fonction de leur nature et de leur intensité, il est possible de procéder à un zonage du territoire étudié en fonction des pressions exercées sur l'environnement, lequel permet de faire ressortir, le cas échéant, les zones de pollution critique au niveau de la région et de dégager les besoins et priorités d'action.
Selon les activités économiques et modes d'utilisation des ressources, il y a lieu de s'attendre aux incidences principales suivantes sur l'environnement :
- émissions de polluants (gazeux, liquides, solides),
- émissions de bruit,
- imperméabilisation du sol par des constructions trop denses, consommation de surfaces,
- urbanisation/découpage d'espaces naturels nécessaires à l'équilibre écologique ou remplissant d'autres fonctions importantes,
- perte de terre arable par exploitation des ressources du sol, par érosion,
- compactage du sol/modification de sa structure,
- salinisation/dégradation, épuisement de l'humus (dégradation), fertilisation excessive (salinisation),
- abaissement de la nappe phréatique,
- modification de la dynamique d'écoulement des eaux/du bilan hydrologique de la région,
- exploitation de peuplements végétaux/d'espaces naturels méritant protection.
Pour analyser les problèmes et établir une base pour la planification des objectifs et activités destinés à les résoudre, il convient de dégager les liens de cause à effet entre les auteurs et les victimes des pollutions, d'analyser dans la mesure du possible la nature, l'ampleur et la direction dans laquelle vont les changements induits par les utilisations actuelles et de délimiter les zones affectées par les atteintes à l'environnement.
Les objectifs prioritaires de l'homme par rapport à l'environnement sont - outre d'assurer la satisfaction de ses besoins essentiels - de protéger son bien-être psychique et physique (santé) et de garantir la qualité de la vie. Ces intérêts existentiels peuvent être satisfaits indirectement par la sauvegarde des bases naturelles d'existence. Les "utilisations de l'environnement" et les biens culturels (p. ex. modes traditionnels de vie et de production) sont à considérer entre autres sous l'angle de leur importance sociale comme des biens à protéger. L'analyse des interactions et l'élaboration de modèles d'explication causale nécessitent de la part du personnel chargé de ces tâches des connaissances et compétences spécifiques dans le domaine géo-écologique.
L'encadré 2 énumère différents types d'activités ou de projets dont il convient d'évaluer les incidences possibles sur l'environnement en fonction des spécificités régionales :
Encadré 2
Activités exerçant une incidence sur l'environnement
· Construction de logements | · Installations de production d'énergie |
· Installations industrielles et commerciales | · Agriculture |
· Réseaux de transport et de communication | · Exploitation forestière |
(routes, chemins de fer, voies d'eau) | · Pêche continentale et côtière |
· Installations d'approvisionnement | · Détente/tourisme |
· Installations d'élimination des déchets et eaux | · Canalisation et aménagement de cours |
usées, décharges | d'eau |
· Exploitation de gisements miniers/extraction de | · Prélèvements d'eau souterraine |
matières premières | · Rejets dans les eaux de surface |
· Stockage de biens économiques dans le sous- | |
sol (p. ex. pétrole, gaz) |
Il est possible de procéder à une évaluation qualitative de l'intensité d'utilisation et, par analogie, de l'intensité des atteintes à l'environnement, étant donné que l'on ne dispose que très rarement de données quantitatives sur l'état des éléments du milieu naturel, tels que l'air, le sol et l'eau (voir p. ex. Gassner, Winkelbrandt 1990). Cette évaluation qualitative est effectuée à l'aide d'indicateurs.
Les indicateurs auxquels on peut recourir sont p. ex. :
· Agriculture : pratiques d'exploitation prédominantes, emploi d'énergies externes (fréquence de travail du sol, mécanisation, apport d'engrais et de pesticides) agriculture irriguée ; cultures spéciales ; fréquence et densité de pâturage ; modes d'élevage).
· Elimination des eaux usées : nombre et nature des rejets (origine des eaux usées ménagères/industrielles) ; existence/état du réseau d'égouts et des installations d'épuration
· Industrie/commerce : types d'entreprises, niveau des techniques antipollution utilisées, nature et ampleur des émissions gazeuses/liquides/solides
· Circulation : densité du trafic, état d'aménagement du réseau routier ; pourcentage de poids lourds ou de camions dans la circulation routière
Le cadre d'appréciation doit être adapté aux conditions régionales ou locales ; p. ex. certains modes d'exploitation qui sont à classer comme ("relativement") intensifs dans des écosystèmes sensibles, peuvent apparaître relativement extensifs dans d'autres contextes.
Les plans d'aménagement urbain (extension), d'implantation des activités industrielles et commerciales (choix des sites) et d'aménagement de la circulation (désenclavement) provoquent des changements dans les structures spatiales et/ou socio-économiques qui entraînent à leur tour des effets secondaires sur le milieu naturel et sur l'environnement socio-économique. Même des projets individuels peuvent, le cas échéant, déclencher ainsi des chaînes de réactions pouvant avoir des répercussions graves à un niveau suprarégional.
Parmi les effets secondaires typiques d'un aménagement infrastructurel, il y a lieu de citer p. ex.:
- établissement d'immigrants et mise en culture de terres (p. ex. Amazonie),
- implantation incontrôlée d'industries et d'autres activités économiques entraînant des déplacements de population et/ou l'extension des établissements humains existants par suite de l'arrivée d'immigrants,
- intensification de l'exploitation d'une ressource entraînant éventuellement la dégradation du site,
- augmentation des émissions polluantes liquides, solides et gazeuses (p. ex. production de déchets et/ou augmentation du volume des déchets et/ou des eaux usées par suite de l'extension des agglomérations) et
- transformation des conditions socio-économiques par suite de changements intervenus dans les structures d'approvisionnement et de commercialisation ou par suite de l'augmentation des prix fonciers ou du coût des logements induite par le gonflement de la demande (processus d'exclusion socio-économique).
Ce dernier aspect est à examiner principalement dans le cadre d'études d'impact social (répercussions sur des minorités ethniques, sur les femmes, les enfants, les structures familiales et les formes de vie traditionnelles).
Le problème principal que posent les effets secondaires réside dans le fait qu'il est difficile de les prévoir et donc de gérer leur évolution à l'aide d'un plan. Il faut y remédier, le cas échéant, au niveau national par des mesures complémentaires.
Au niveau de l'aménagement du territoire et de la planification régionale, il est particulièrement important d'analyser les facteurs à effets cumulatifs et/ou synergiques. Des effets qui se renforcent mutuellement tels que le déboisement et l'exploitation simultanée de terres exposées à l'érosion peuvent, p. ex., entraîner des processus de dégradation irréversibles. L'examen isolé des projets ne peut suffire pour appréhender toutes les conséquences écologiques pouvant résulter p. ex. de l'addition de plusieurs projets susceptibles d'exercer une incidence sur la région concerné.
L'inventaire de tous les facteurs altéragènes doit être mis dans la balance et comparé à la capacité productive ou à la sensibilité des biens naturels, sans oublier de tenir compte des pollutions et nuisances antérieures.
L'estimation des risques peut se faire à l'aide d'un cadre d'appréciation, en comparant les incidences évaluées sur l'environnement (intensité d'utilisation ou de pollution) aux caractéristiques évaluées d'aptitude et de sensibilité des biens naturels.
Il y a, par ailleurs, au niveau supralocal, des facteurs démographiques, juridiques et institutionnels ainsi que des aspects de la politique économique, sociale et de développement qui jouent un rôle non négligeable dans l'évolution de la situation environnementale, mais qui sont hors du champ d'influence de l'aménagement du territoire. Pour modifier ces facteurs dans un sens favorable à la sauvegarde de l'environnement, il importe de créer/améliorer les conditions d'ensemble nécessaires à un aménagemen de l'espace respectueux de l'environnement.